Naissance

Tu t'enracines en un désert.

la brume qui toujours te perd

t'oblige à regarder ailleurs.

où sont tes yeux arbre sans fruit ?

si tu les clos, pas une fleur  ne s'offre à l'abeille qui pleure.

dans tes rêves tu es saumon

dans le courant tu luttes et ris

tu ne verras pas tes enfants

mais tu crois qu'ils seront plus grands

et jailliront libres de vie

l'espèce est loin

es-tu l'adam ?

ce jugement est ton printemps

interminable. 

Si près de toi

inconnu tu t'élèveras

ne distingue pas ton visage

au loin repousse-le.

Aurore

le rideau tombera

recouvrira ton corps

laisse aux masques encore

la parole et l'espoir

déguster le jeu noir

et savourer la mort

Des anges chantent dans la forêt au désert de ma mémoire

 

Endroit

Au lit de ma mémoire coule un fleuve écarté

sans espoir est sa rive et tu dois la garder

d'éternelles saisons rythmées de tes cassures

tu ignores en quel temps de ténèbre et d'azur

jailliront les soleils et l'obscur ... mystère

fermant deux floraisons, enfance sous la terre

de cet arbre interdit qui se nourrit de toi

goutte calmement l'ombre aérée de ses doigts

frôlant sous un rayon apaisé le frisson.

tremble de retourner au terrible horizon

l'ancien t'aura conduit par l'idole honorée

tes jours seront plus longs que les jours de Noé

 

Envers

 Dans l'infini glissant où nulle aspérité

ne permet à la mousse et au vent d'arrêter

un brouillard, une tache où le regard se pose

un lit de verdeur douce ou le corps se repose


Un sphinx vient parfois ou bien quelque hippogriffe

et de ses ongles grave d'ignorés hiéroglyphes


son entrée en ce lieu d'une goutte de sang

et d'un cri de douleur, l'aérien, tu ressens


par où se glisse-t-il habitant d'aucun monde ?


sur la crête tu cours ailé de ton silence

et le sens et le temps se jouent en sa présence



Fovéa

course solaire

immense oubli
où s'ouvre un cercle
d'infinie
reconnaissance

diamant de boue

l'argile vit
se rêve et danse
dans les habits
de la présence

rythmes l'émoi

de ton esprit
traces où ta portée
prédit
tes renaissances


fumées de mots

cendres et pluies
formes surgies

le temps s'écrit
en ce silence

étoile inerte

magma de nuit
vie de l'envers
douce pythie
fidèle errance



Paysages

dans l'enfance je voyais loin

elle m'a frôlé de ce frisson

j'ai dit le flou la précision

usé mes ongles sur les angles

centre carcasse ouverte au vent

antre des peurs

orient vers le monde vivant

 

et l'oubli m'a léché comme un limier errant 

mon rêve était curieux de cet autre qui fuit

et s'écoule en pleurant dans l'inouïe nuée

cette nuit je l'ai saisie

elle a parlé

je l'ai aimée

elle a gémi

des perles emboîtées

à l'abîme

j'ai contemplé

l'inquiétante proximité

du sens et du temps nouveau-nés

du créé au corps disparu

du retour sans cesse prévu

retour sans immobilité 

mes yeux depuis longtemps fermés

ont vu plus loin sous le glacier

frères humains venez m'aider

ou m'accompagner

dans la glace où je me glisse

à plus tard , ecce...nostris

 


           Mort de la poésie

naissance, endroit, envers, fovéa, paysages
qui voulez dessiner à mi-voie des visages
détournez le regard d'où sifflent les cheveux
et pour vous protéger : ce bouclier
                                                   je veux
forger l'anneau qu'attend celle qu'on craint d'aimer
être humain du poème à la mort l'essaimer